(à quelqu’un d’autre que le loueur de luges ou la dame du tire-fesses)
Ce sujet a bien sa place dans la Capsule Ignition Time ! Il a bien à voir avec le monde du travail tel qu’il est et tel qu’il deviendra. Dans un même écosystème, celui des stations de ski, se rencontrent, se côtoient, se nourrissent, s’affrontent :
⛷ les loisirs des uns
👷♀️ le travail des autres : ceux qui font tourner l’activité “ski”, ceux qui font vivre la montagne au sens large, ceux qui se creusent les méninges sur la viabilité des modèles d’affaires de la montagne l’hiver…
🏔 l’environnement de tous : le touriste, le contribuable, skieur ou pas, les glaciers, le climat, l’eau…
💶 et leurs portefeuilles respectifs
Mes sources
Les Stations de Montagne face au Changement climatique, rapport de la Cour des Comptes (février 2024)
L’épisode de podcast : Les Stations de Ski, c’est fini ?, Sans oser le demander, 20.2.2023
L’épisode de podcast : Ski, la Fin d’un Modèle économique ? Entendez-vous l’éco ? 9.2.2024
La décision du tribunal administratif de Grenoble, rendue le 15 février 2024, qui annule le Plan Local d’Urbanisme de l’Alpe d’Huez
Le Monde du 13 mars 2024, Marie-Charlotte Iratzoquy, une championne de ski tiraillée par sa conscience écologique
Quelques chiffres
🥈 La France 🇫🇷 est une destination majeure pour le tourisme hivernal : avec 53,9 millions de journées-skieur, elle se classe ainsi au 2ème rang mondial, après les États-Unis 🇺🇸 (61 millions).
🛌 Le tourisme montagnard représente actuellement 22,4 % des nuitées touristiques en France.
🚡 Le secteur des remontées mécaniques représente un chiffre d’affaires de 1,6 Md€. La France possède le premier parc mondial de remontées mécaniques.
Néanmoins, d’après la Cour des Comptes, qui a réalisé 39 contrôles, correspondant à 42 stations et 43 organismes, répartis sur les Alpes, les Pyrénées, le Massif central et le Jura, face au changement climatique, le modèle économique du ski français s’essouffle.
Le modèle économique des stations de ski est durablement affecté par le changement climatique
Il se manifeste d’ailleurs de manière plus marquée en montagne qu’en plaine et toutes les stations seront plus ou moins touchées par ce déclin à horizon de 2050.
La hausse des températures
🌡 Si la température moyenne en France métropolitaine a augmenté de 1,7 °C depuis 1900 selon Météo-France, ce changement est plus important dans les Alpes (+ 1,97 °C entre 1900 et 2016). Et on observe une nette accélération du changement entre 2016 et 2020.
Un enneigement moindre des stations de ski
❄️ En volume et en durée.
La fonte du pergélisol
Le pergélisol (ou permafrost) est un sous-sol gelé en permanence, situé dans les régions alpines, arctiques et antarctiques. Sa fonte présente des risques naturels associés. Le rapport de la Cour des Comptes mentionne ainsi que 974 infrastructures sont présentes sur des terrains à pergélisol, dont 74 % sont des remontées mécaniques.
Une contrainte sur les ressources en eau
Le changement climatique aboutit à une contrainte sur la disponibilité de l’eau des zones de montagne non seulement s’agissant des usages locaux mais également des territoires situés en aval. Le nombre d’arrêtés dits “sècheresse” augmente dans les départements de montagne, et sur des périodes de plus en plus longues, y compris en automne, moment où les stations de ski prélèvent de l’eau pour remplir leurs retenues.
L’érosion de la fréquentation des stations de ski est notoire depuis la fin des années 2000
Elle est expliquée par :
Un niveau d’enneigement non garanti
Le vieillissement de la clientèle historique
La clientèle historique vieillissante n’a pas été intégralement remplacée par de plus jeunes touristes. On assiste à une baisse de la communication et des incitations auprès des jeunes (classes de neige, tarifs avantageux pour les locaux…).
Le “ski-bashing” ?
L’empreinte environnementale des séjours à la montagne est liée à l’émission de gaz à effet de serre dégagés pour l’essentiel par les trajets des visiteurs, les besoins en énergie des bâtiments mal isolés, la consommation d’énergie et d’eau des domaines skiables et l’impact humain dans des territoires à la biodiversité riche mais fragile.
La dégradation du patrimoine immobilier
Cause ou conséquence de l’érosion de la fréquentation, le fait est que 50 % des logements situés dans les stations ont un classement énergétique noté F ou G et peuvent donc être considérés comme des “passoires énergétiques” ; ce ratio est de 16,9 % en moyenne nationale.
L’équilibre financier des stations de ski est fragilisé
À compter de la fin des années 2000, et sur fond de changement climatique, la diminution de l’activité ski et l’inadaptation croissante du patrimoine immobilier des stations ont commencé à fragiliser l’équilibre financier des remontées mécaniques et l’économie locale qui en découle pour partie.
L’économie des remontées mécaniques
Le contexte français de gestion des remontées mécaniques est spécifique
La loi du 9 janvier 1985, dite “loi montagne”, a qualifié le service des remontées mécaniques de “service public industriel et commercial”. Les communes jouent un rôle clef soit en assurant en direct l’exploitation des domaines skiables soit en la délégant à des opérateurs privés. Ce modèle est atypique par rapport à la concurrence internationale, qui considère le ski non comme un service public mais comme une activité de loisirs relevant du secteur privé.
L’équilibre financier des remontées mécaniques est précaire
L’activité de remontées mécaniques nécessite de lourds investissements et un niveau de fréquentation suffisant, permettant dans l’idéal de dégager les recettes nécessaires au renouvellement des immobilisations.
Ces recettes devraient en principe provenir de l’usager utilisateur des remontées mécaniques. En réalité, le service est souvent financé par la commune, directement (par des subventions) ou indirectement (lorsque la collectivité ne prélève pas certaines taxes : taxe sur les remontées mécaniques, taxe de séjour…).
En effet, si les ressources issues de l’activité, principalement la vente des forfaits de ski, arrivent généralement à équilibrer les coûts d’exploitation, de nombreux gestionnaires ont de grandes difficultés à assurer le financement du renouvellement des installations.
L’activité des remontées mécaniques est donc fortement dépendante des subventions publiques. Les financements publics perçus par les opérateurs des remontées mécaniques dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 15 M€ sont estimés à 124 M€ par an. Ce montant doit être rapproché du chiffre d’affaires total de l’ordre de 529 M€ généré par ces opérateurs, soit un niveau de dépendance à la dépense publique d’environ 23 %. Pour les stations réalisant moins de 10 M€ de chiffre d’affaires, le montant est de 87 M€ représentant 28 % du chiffre d’affaires des stations concernées.
Ces financements par la puissance publique conduisent à reporter la charge d’une activité touristique de l’usager vers le contribuable.
Le coût de la neige
La production de neige est une alternative fréquemment mise en œuvre pour préserver l’équilibre financier des stations. Le chiffre d’affaires de certaines d’entre elles est ainsi extrêmement dépendant de l’enneigement sur les deux semaines de vacances scolaires de la zone concernée.
Cependant le développement de la production de neige requiert des investissements directs (canons à neige, réseau d’alimentation en eau, fermes à neige…) ou indirects (création de retenues collinaires), ce qui renforce le caractère très fortement capitalistique de cette activité.
La vue d’ensemble au niveau de la station de ski
Les prévisions et plans d’affaires des stations ne sont pas toujours réalistes. Ils misent sur des fréquentations stables, de l’enneigement, prévoient des investissements massifs en lien avec la construction d’hébergements, sans que la fréquentation ne soit au rendez-vous…
Or, les équipements doivent être amortis sur des périodes longues, parfois incompatibles dans l’absolu avec les évolutions climatiques et la viabilité des stations.
À défaut d’ une rigoureuse planification pluriannuelle des investissements, les investissements non amortis constitueront une charge future pour la collectivité et potentiellement, pour le contribuable.
l'aveni
A titre d’exemple, des friches industrielles apparaissent dans les montagnes françaises : près de 200 installations inutilisées et non démontées sont recensées au niveau national (remontées mécaniques). Ce n’est que depuis 2016 que la loi impose aux autorités organisatrices l’obligation de démanteler les remontées mécaniques définitivement inutilisées. Toutefois, aucune sanction n’est prévue et aucune obligation n’existe pour les installations construites avant 2016. Depuis une vingtaine d’années, l’association nationale de protection de la montagne Mountain Wilderness, pionnière dans le démontage des installations obsolètes auxquelles elle consacre une plateforme participative de recensement, a mené à bien plusieurs chantiers de démontage. Ces actions ont engendré une prise de conscience écocitoyenne. Il conviendrait donc de systématiser ces études d’impacts, lors de chaque demande relative à la création, l’extension ou le remplacement d’installations, quelle que soit leur emprise foncière, afin de préserver les écosystèmes et d’éviter l’apparition de futures friches touristiques.
La balance coûts/ avantages pourrait-elle retrouver un certain équilibre si l’on considérait les retombées globales du ski sur l’économie locale ?
D’après la Cour des Comptes, les modalités de calcul des retombées économiques du ski sur l’économie locale, souvent mises en avant, sont insuffisamment documentées. Un ratio “un pour six” est généralement présenté (Chiffre relayé notamment par Domaines skiables de France dans son recueil des indicateurs et analyses de 2022) : un euro dépensé dans un forfait de remontées mécaniques générerait six euros de retombées sur l’économie locale. Ce serait sans compter quelques problèmes méthodologiques : l’étude a porté quasi exclusivement sur des grandes stations. Le ratio ne peut être transposé mécaniquement à tous les types de stations. De plus, ce ratio suggère que les 6 € de retombées économiques profitent uniquement à la station, alors qu’une partie concerne soit le territoire proche, soit des acteurs plus éloignés de la montagne. C’est en particulier le cas pour les produits du logement, qui bénéficient aux propriétaires des locations, lesquels ne sont que pour une faible part des habitants de la station ou des acteurs économiques purement locaux. Enfin, ce ratio ne prend pas en compte les dépenses publiques nécessaires à l’économie du ski : entretien des voiries, aménagement urbain, transports collectifs.
Ce type de ratio, qui permet d’approcher l’importance des retombées économiques du ski, qui sont incontestables, est insuffisant pour fonder des décisions de politique publique concernant l’avenir des stations.
Les politiques d'adaptation des stations de ski restent en-deçà des enjeux
La production de neige
Son efficacité tend à se réduire avec la hausse des températures. De plus, l’impact de la production de neige sur les ressources en eau apparaît sous-estimé dans de nombreux territoires.
Aujourd’hui, 39 % du domaine skiable français est couvert par de la neige produite (contre 19 % en 2007). Cela reste inférieur aux taux de couverture observés dans d’autres pays, notamment l’Autriche où il avoisine 60 % ou les États-Unis où il atteint 85 %.
La neige est produite mécaniquement à partir de gouttelettes d’eau pulvérisées, qui se solidifient au contact de l’air froid pour former des cristaux de neige qui se déposent sur le sol. La production ne peut se faire qu’à partir d’une température humide de - 2 °C mais est optimale lorsqu’elle est comprise entre - 5 et - 8 °C. Aujourd’hui, l’équipement en enneigeurs ne repose pas toujours sur une évaluation rigoureuse des perspectives climatiques. Par exemple, certaines études reposent sur la fiabilité de l’enneigement mais n’abordent pas la question des ressources en eau et en énergie nécessaires à la production de neige.
Certains équipements seraient moins énergivores : barrières sur les pistes exposées aux vents pour récupérer la neige accumulée…
Quelques stations particulièrement exposées aux conséquences du changement climatiques ont d’ores-et-déjà adopté des stratégies alternatives à la production de neige. Ainsi la station du Mont-Dore a adopté “une stratégie d’intensification contenue”. Après avoir multiplié par deux sa production de neige depuis sept ans, elle arrête l’activité de ski en l’absence de neige naturelle et n’utilise la production de neige qu’en prévision des vacances de février qui génèrent 40 à 65 % des recettes de la saison hivernale.
Sur les cinq dernières années, 45 M€ ont été investis chaque année en moyenne sur des installations de production de neige, ce qui représente 13,6 % du montant total des investissements des stations.
Le coût de production de la neige croît avec la température : ainsi la station de Super-Besse estime par exemple que produire à une température de - 2,5 °C serait sept fois plus cher que produire à - 6 °C. À cela s’ajoutent les incertitudes sur la hausse du coût de l’énergie.
La Compagnie du Mont-Blanc, gestionnaire du domaine skiable de Chamonix, estime que le coût en eau et énergie pour la production d’un m3 de neige devrait augmenter de 75 % en 2024 par rapport à 2023.
Le nécessaire partage de la ressource “eau”
L’alimentation en eau des enneigeurs peut provenir de différentes sources : rivières, nappes phréatiques, réserves d’eau potable, barrages hydroélectriques et retenues collinaires.
Les prélèvements destinés à compléter l’eau acquise par ruissellement dans les retenues, ont généralement lieu à la fin de l’automne. L’extension des périodes de sècheresse sur cette saison tend à invalider l’argument avancé par les exploitants de stations d’un prélèvement sans impact notable car réalisé avant la période d’étiage des cours d’eau.
Dans un contexte de diminution globale de l’eau disponible, le partage de la ressource entre les concessionnaires d’hydroélectricité et les stations de ski pourrait être remis en cause.
Le fait de stocker l’eau dans des retenues a des conséquences sur les débits des cours d’eau en aval, sur la morphologie des cours d’eau du fait des sédiments retenus, sur la qualité physico-chimique des cours d’eau en retenant certains composants et pas d’autres, et par suite, sur la biodiversité des cours d’eau.
Au vu des développements qui précèdent, l’État devrait faire évoluer le cadre normatif afin que les autorisations de prélèvements d’eau destinés à la production de neige tiennent compte des prospectives climatiques.
La course à l’altitude
Il s’agirait de restructurer le domaine skiable à des altitudes plus élevées, quitte à y consacrer d’importants volumes financiers, sans toujours prendre en compte les projections d’enneigement à moyen terme ni veiller à diversifier leur activité hors du “tout ski”.
La diversification des activités
La diversification des activités de montagne est une stratégie d’adaptation qui n’est pas très exploitée. Cette diversification peut prendre la forme d’activités hivernales pour les non-skieurs, d’activités “après le ski”, mais aussi d’activités estivales et pendant les “ailes de saisons” (luges d’été, tyroliennes, parcs d’activités incluant parcours d’aventure ou espaces de baignades, espaces aqualudiques, etc).
Ces différents projets et les équipements qu’ils impliquent ont pour caractéristique d’être assez fortement subventionnés. Ils ont un impact sur l’artificialisation des sols et peuvent conduire à dégrader des sites. Ils tendent souvent à reproduire le modèle du ski, fondé sur des investissements importants et une forte fréquentation, sans plan d’affaires permettant d’établir leur pertinence économique. Lorsqu’il existe un suivi financier, celui-ci fait généralement apparaître un déséquilibre. Ainsi aux Gets la commune a multiplié depuis 30 ans les projets de diversification de son offre touristique : fort développement du VTT de descente, parc aqualudique, spa “Les sources du Chéry”, parc nocturne interactif “Alta Lumina”, luge sur rail, parc acrobatique en hauteur, golf etc. Une grande partie de ces activités a été confiée à la société d’économie mixte locale également gestionnaire du domaine skiable. Celle-ci envisage à terme un forfait multi-saisons qui permettrait d’accéder de manière illimitée à ce panier d’activité. À ce jour, ces activités sont déficitaires et restent financées par les revenus du ski.
Les initiatives des collectivités territoriales sont peu coordonnées entre elles, entraînant un risque de concurrence entre territoires. Parmi les rares exceptions, la commune de Chamonix a mis en place plusieurs plans ou programmes d’adaptation à l’échelle intercommunale. De même, la station de Val d’Azun en élargissant sa gouvernance à l’échelon intercommunal, parvient à la mise en œuvre d’une stratégie “quatre saisons” équilibrée.
Le risque demeure que les actions de diversification se juxtaposent au soutien à la production de neige, sans réflexion sur l’articulation entre ces deux politiques.
Une consommation, notamment énergétique, plus raisonnée
Plusieurs stations prennent des mesures visant à réduire leur consommation énergétique et limiter leurs atteintes à l’environnement : écoconduite des engins de damage et des remontées mécaniques les plus récentes, réduction de vitesse ou de puissance en période de faible affluence. En outre, la fermeture des installations redondantes en-dehors des périodes de vacances scolaires, la fermeture du ski de nuit (à Chamrousse), la modulation des plages d’ouverture du domaine skiable (Isola 2000) et l’avancement de la fermeture annuelle des remontées mécaniques (à Vars), sont autant d’actions contribuant à une gestion rationalisée des équipements. Enfin, des techniques innovantes permettent de réutiliser l’énergie produite par les remontées mécaniques : Val-Cenis a ainsi installé des systèmes de récupération de chaleur pour le chauffage de certains locaux. Cependant ces dispositifs restent ponctuels et leur suivi est lacunaire.
Une gouvernance inadaptée
Une gouvernance centrée sur l’échelon communal
Avec une gouvernance centrée sur l’échelon communal et des regroupements insuffisants, l’organisation actuelle ne permet pas aux acteurs de la montagne de s’adapter aux réalités du changement climatique à l’échelle d’un territoire pertinent. Le territoire communal est trop étroit et centré sur les seules remontées mécaniques.
Les exemples d’Andorre et des Dolomites en Italie montrent que la fédération d’un ensemble de stations de ski à une échelle plus large facilite la transition et la survie des stations. Elle permet de développer des offres commerciales coordonnées, et de disposer de moyens plus importants pour financer les projets. Ces transferts de compétences à des échelons plus larges que ceux des communes doivent néanmoins être anticipés, les intercommunalités étant logiquement réticentes pour récupérer des déficits devenus trop lourds.
En France une solidarité inter-communes de stations de montagne pourrait être envisagée. Domaines Skiables de France a mis en place un dispositif destiné à couvrir le risque de manque d’enneigement, ce qui constitue une forme de solidarité financière. Mais il ne porte que sur l’aléa climatique à court terme et ne répond donc pas aux enjeux de moyen terme.
D’autres acteurs sont impliqués dans la gouvernance des stations
L’Etat
Selon l’article premier de la “loi montagne”, il revient à l’État “de prendre en compte et d'anticiper les effets du changement climatique en soutenant l'adaptation de l'ensemble des activités économiques à ses conséquences, notamment dans les domaines agricole, forestier et touristique.”
L’État entend fixer une trajectoire nationale de réchauffement, servant de référence pour toutes les actions d’adaptation, y compris locales.
Les régions
Elles sont compétentes en matière de planification touristique. Elles déploient une politique de subventionnement et de participation au capital des sociétés exploitantes.
Les départements
Les départements interviennent essentiellement comme financeurs par le biais de leurs compétences “tourisme” et “solidarité territoriale”. Ils déploient une politique de subventionnement et de participation au capital des sociétés exploitantes.
Une articulation à trouver
Les politiques territoriales et nationales gagneraient à être mieux coordonnées, notamment en vue de conditionner leur soutien à l’investissement vers les stations dont les plans d’adaptation au changement climatique seraient les plus réalistes.
En outre, la gouvernance pourrait valablement comprendre les acteurs privés, parties prenantes de l’écosystème touristique, afin que la coordination soit complète et cohérente. À cet égard, le modèle des sociétés d’économie mixte peut être utilisé.
Le volet financier
Comme nous l’avons vu l’économie des stations est actuellement très dépendante des subventions publiques.
Quid d’affecter une part des revenus du ski au financement de la transition ?
Pour financer la transition vers de nouveaux modèles touristiques, un effort pourrait être demandé aux usagers des remontées mécaniques, en augmentant les tarifs des forfaits. D’après l’édition 2023 du rapport international sur le tourisme de neige et de la montagne, le prix moyen du forfait de ski pour les grandes stations françaises est évalué à près de 56 € par jour. Il s’agit du tarif le plus faible parmi les cinq grandes nations du ski. Ce plafond tarifaire, évalué à environ 400 € par semaine pour un forfait adulte de sept jours, n’est jamais franchi, quelle que soit la capacité des installations proposées et donc des coûts réels d’exploitation, de maintenance et d’amortissement.
Une approche globale du coût de la transition reste à parfaire.
Aucune étude précise n’a été menée pour chiffrer globalement le coût de la transition touristique des stations de montagne. Certaines études permettent néanmoins d’en avoir une approche. Ainsi, l’institut d’économie pour le climat a procédé en 2022 à une évaluation du coût de l’adaptation au changement climatique en France. Outre les évolutions plus structurelles visant à “réorienter significativement l’économie dans certaines zones de montagne”, les premières mesures promues encouragent la pérennisation du fonds avenir montagnes et incitent à flécher les investissements vers les projets contribuant à l’adaptation, pour une dépense évaluée à 91,7 M€ par an. Ce chiffre, qui ne couvre que les premières mesures, ne répond ainsi pas à l’intégralité du besoin s’agissant d’une pleine et entière transition du modèle économique des stations vers l’adaptation au changement climatique. La Cour des Comptes évaluerait plutôt à 124 M€ le soutien public à des stations exerçant une activité de loisirs, lesquelles sont en moyenne déficitaires. Ce montant ne pourra que s’alourdir compte tenu des projections climatiques. Est ainsi préconisée une réorientation fondamentale de la dépense publique vers la transition écologique, que ce soit sur les investissements ou sur l’aide à l’ingénierie.
Le score de vulnérabilité
En matière d’aide à la décision, la Cour des Comptes a développé pour les besoins de son enquête un score de vulnérabilité spécifique à chaque station. Celui-ci a été obtenu par la mise en relation de trois types de données : le risque climatique, le poids socio-économique de la station et la capacité financière de l’autorité organisatrice des remontées mécaniques.
Les stations des Alpes du Nord sont celles qui obtiennent des scores de vulnérabilité relativement faibles. Idem pour des stations hors Alpes du Nord mais qui sont moins dépendantes de l’enneigement. Ce score de vulnérabilité pourrait constituer un indicateur pour le pilotage de politiques concertées.
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